Presque un mémoire, ce livre raconte l'enfance de l'auteur dans le Nord de la France sous l'occupation et les bombardements. Il est surtout une preuve que l'enfance permet d'échapper à l'horreur de la guerre, tout en portant un regard critique et naturel à ce dangereux jeu d'adulte.
L'auteur vu par l'éditeur.
Jacques Duquesne, romancier à succès, journaliste et amoureux des lettres est aussi Président du comité de surveillance de "L'Express". Il a récemment publié Le bonheur en 36 vertus aux éditions Albin-Michel.
« J'ai longtemps hésité avant d'écrire ce livre. Mes souvenirs d'enfance sont uniques, certes, mais la plupart n'ont rien d'original. Il y eut la bataille de Dunkerque bien sûr, et la guerre. Le reste, c'est la vie d'une famille du peuple dans le Nord industriel, la vie d'une rue, d'un quartier que l'on dirait aujourd'hui "sensible", d'un monde disparu. Je m'agace parfois d'entendre parler de mémoire : la répétition de ce mot, toujours repris, m'énerve autant qu'une rengaine. Je ne suis pas non plus très porté à faire confidence. Mais les gens de ma rue, les miens, ont mérité que l'on parle d'eux aussi. Ce que ces humbles ont vécu doit laisser une trace. Pourquoi chercher d'autres justifications ? J'écris ce livre parce que le désir m'en a pris. Et je voudrais le commencer par cette affirmation : en dépit de ce que l'on vient de lire, ou de ce que l'on va lire parfois, nous avons connu le bonheur. » J. D.
Face à la mort de son frère, l'auteur plonge dans ses souvenirs d'enfance, soixante ans plus tôt dans le Nord de la France, et repense à la dignité du monde ouvrier, à sa mère croyante, dure à la tâche, les mains rongées par les travaux domestiques, à son père, agent de police et « agent cycliste », fier, simple et toujours muni d'une sacoche qui, enfant, le faisait rêver. Il se remémore la vie en ces temps-là, mais surtout une image qui le hante depuis le 10 mai 40, celle d'un cheval blanc galopant sur la route et défiant la mort, la tête haute, le poitrail en sang et les tripes s'échappant de son ventre.
Tout est vu par les yeux de cet enfant de neuf ans, la peur, le rationnement, les nuits passées dans les caves, les blessés et les morts, et au milieu de tout cela les joies de l'écolier qui coupe à des cours de géographie grâce à des bombardements, qui découvre le monde à travers les photos de Match et les cigarettes des soldats anglais. Il a 14 ans lorsqu'il raconte la libération avec un mélange de fascination et de terreur, d'horreur et d'esprit d'aventure, et cela dans une ville qui aura particulièrement souffert de la guerre, et qui aura été, de toutes les villes de France, la dernière à être libérée. Cette chronique d'une enfance au temps de la seconde guerre mondiale, laisse entendre une petite musique singulière, un ton simple, authentique et de grandes qualités d'âme. Un récit qui va bien au-delà du simple témoignage en dévoilant le Nord de la France qui a gardé une particularité que la guerre et l'occupation allemande n'ont fait que renforcer.
Te souviens-tu du cheval ?
Peu avant de mourir, le frère de l'auteur lui demande : "Te souviens-tu du cheval ?" Ainsi resurgit un souvenir vieux de soixante ans : près de Dunkerque bombardé par les Allemands, les deux garçons âgés d'une dizaine d'années ont vu passer un cheval couvert de sang, perdant ses viscères sur la route. De là est venu à Jacques Duquesne le désir d'écrire ce livre, évocation de son enfance dans le Dunkerque des petites gens. Sa mère, fervente catholique, dure à la tâche, usée par les travaux domestiques; son père, agent de police cycliste, qui doit affronter aussi bien les rixes d'ivrognes sur le port que les accouchements précipités; l'école aux méthodes à l'ancienne, où l'on attache son bras gauche à la chaise pour qu'il écrive de la main droite; et puis enfin la guerre, qui va frapper très durement cette ville ouvrière et portuaire, laissant au jeune garçon des souvenirs marquants. "Et pourtant nous étions heureux" : toute la magie et la leçon du livre est là. Heureux dans un foyer profondément uni, où les deux enfants trouvent la tendresse et le respect de valeurs essentielles et durables; heureux aussi, peut-être, à cause de l'éternelle insouciance de l'enfance. Jacques Duquesne rend ici à ses parents et à son milieu d'origine un hommage profondément émouvant